Échos

Crédit : G. Lechevalier-Boissel

Une histoire de tribune : de Louis Vierne à Pierre Cochereau, Léonce de Saint-Martin (1886-1954) par Marie-Christine Steinmetz

Association Boëllmann-Gigout (22, rue Montgallet – 75012 Paris)
boellmann-gigout@wanadoo.fr

Par Henri Pourtau

Voici un ouvrage bien documenté qui éclaire un aspect encore peu connu de la vie de l’orgue en France.

Léonce de Saint-Martin : un talent méridional germé entre Ariège et Tarn. Une vocation précoce de musicien pourtant contrariée par un père qui l’oblige à faire d’abord son droit à Montpellier, puis par la Grande Guerre. Une fois rendu à la vie civile, il a dépassé les 30 ans. Trop tard pour aspirer à la classe de Gigout au Conservatoire. Il va donc travailler notamment sous la direction de son compatriote Adolphe Marty, puis avec Louis Vierne qui le choisit comme l’un de ses suppléants en 1924 et à qui il succède en 1937.

Dans le sillage du nouveau titulaire, on aborde ainsi Notre-Dame au coeur des heures sombres de la Seconde Guerre mondiale : messes de la Nativité célébrées dans la pénombre, grandes bâches de protection pour obstruer l’espace des verrières déposées, foules en prière dans la cathédrale… Et puis, plus tard, les grands moments de l’Histoire ou les offices nationaux : le Te Deum de la victoire, les obsèques du général Leclerc, celles du maréchal de Lattre de Tassigny etc.

Autres pôles de l’activité de Saint-Martin, l’accompagnement des derniers films muets (il fut titulaire de l’orgue Puget du Théâtre des Champs-Elysées…), son important travail de transcriptions pour orgue et les diverses expertises commandées par le ministère des Dommages de Guerre. Sans oublier la curiosité du féru de physique qu’il était pour les expériences de « l’orgue à lampes », l’ersatz naissant.

Comme Marcel Dupré, son ami et exact contemporain, Léonce de Saint-Martin a su protéger « son » Cavaillé-Coll des altérations du leurre de « l’orgue à tout jouer » qui commençait alors à s’affirmer. Son influence a par ailleurs été déterminante dans la nomination de Pierre Cochereau comme successeur.

Le soin qu’il mettait dans son activité d’organiste liturgique est également souligné : on pourra le constater à la lecture des programmes des dimanches après la Pentecôte élaborés avec un rare éclectisme.

Avec intérêt, on découvre aussi des extraits de notes personnelles : celles de François Carbou (présent à la tribune de Notre-Dame dès 1949), de Louis Vierne, de Pierre Moreau, du chanoine Gaston Roussel (qui fut son élève), etc. Également « Ainsi soit dit », un intéressant témoignage de Janine Fontanges qui fut proche de l’artiste.

Au fil des pages, se révèlent ainsi quelques traits de la vie d’un honnête musicien qui fut aussi, assurément, un honnête homme…